La transat... par les mousses !

Nos 2 mousses chéries, Carole et Soizic, ont regagné la métropole, mardi pour l'une et vendredi pour l'autre.
Il est temps pour moi de conclure "l'épisode transat" en publiant comme promis des extraits de leur carnet de bord.
Les dessins ont été scannés et transférés tels quels. Les textes se révélant peu lisibles, je me fais un plaisir de les recopier pour vous !!

Petit rappel avant publication, il y avait à bord :
Gil, appelé le capitaine
Mouss'Soizic
Mouss'Carole
et moi Isa surnommée selon l'envie des uns ou des autres, l'amiral, la castafiore, Sue Ellen...

Voici donc les mousses dans leurs oeuvres et dans leurs délires, la transat attaque un peu les cerveaux parfois !!



1 - Pour que vous arrêtiez de dire tout le temps qu'on a de la chance...

                POURQUOI VOUS AVEZ DE LA CHANCE D'ETRE RESTES CHEZ VOUS
                ... et de ne pas être sur la Route de la Daurade au Rhum

* Le bleu : il n'existe plus qu'une seule et unique couleur, le bleu : bleu ciel, bleu océan calme, bleu océan en colère, bleu gris... alors que vous, vous profitez de ces teintes brunes, grises, caca d'oie, et de la brume... c'est quand même hyper romantique !

* La garde robe : 3 t.shirts / 3 shorts à combiner à volonté, on a quand même vite fait le tour... Pour vous, tout est possible, et même si votre garde robe est limitée, il y a toujours moyen d'agrémenter avec des accessoires (vous nous imaginez avec une belle étole sur nos shorts/t.shirts ?)

* La "gueule de mer" : Quand on part à l'aventure, on n'imagine pas passer le plus clair de son temps allongé agonisant avec une gueule de bis qui n'en finit pas... Dans votre cas, la gueule de bois a une date de péremption et elle est le signe d'un moment de joie préalable, alors que nous, on le cherche encore !

*Les nuits : Passer 3 à 6 heures par nuit à fixer un écran avec des chiffres qui bougent, ça vous fait rêver ? Dormir par tranches de 5 heures max pendant que les éléments se déchainent, vous trouvez ça cool ? Dites vous que vous dormez paisiblement dans votre lit douillet qui ne bouge pas !

* Qu'on soit gourmand et/ou gourmet, le moment du repas est toujours un grand moment de difficulté On oublie vite ce qu'est le plaisir de manger et on s'y force pour arriver en état. Et vous, vous vous goinfrez avec joie et bonne humeur en pensant déjà à votre prochain repas ou au petit resto qui vous attend ce soir.

* Les journées : Journée type = on discute, on dort, on bronze, on lit, horrible ! Pensez-y en partant au travail !

* Le grand air : Passer les 2/3 du temps dehors et entendre le bruit des vagues et du vent en continu, au secours mes oreilles et ma tête ! Dans votre cas, quelle chance : si vous souhaitez sortir de chez vous, vous pouvez courir au centre commercial de votre choix vous confronter à vos semblables réunis par paquets dans le but d'être prêts pour Noël !

* La météo : le soleil tous les jours (à l'exception de 2 jours de grains) ça devient monotone. En plus, les températures de l'air et de l'eau augmentent chaque jour, c'est fatigant pour nos pauvres organismes ! Vous avez tellement de variété en métropole : ce matin pluie, là une éclaircie, rahhh il a gelé cette nuit, j'espère que le chasse neige est passé, oh du soleil, profitons en pour sortir !

* Les animaux domestiques : ça vous est déjà arrivé un calin de poisson volant (plus proche du coup de boule d'ailleurs) ? Vous, vous avez le doux et chaud pelage de votre chat ou la léchouille de votre ami chien, au moins ça ne sent pas le pouascaille !

* L'hygiène : Je ne vais pas m'attarder mais en gros c'est douche "balancelle" tous les 2 jours et encore si on est capable de descendre au pont inférieur. Maintenant regardez votre douche dans la salle de bains et pensez à nous !

* La santé mentale : On ne va pas vous mentir mais passer plus de 2 semaines à 4 sur un bateau au milieu de l'océan, et bien on tourne un peu la boule. On parle à des bateaux fantômes, on se prend pour de grands marins sur le Vendée Globe, on parle aux poissons, on divague, on se prend pour des animaux... et oui, vous n'avez pas le temps de divaguer vous : métro boulot dodo préparatifs de fête, çà laisse rêveur !

* La vie sociale : au milieu de l'océan, pas d'internet, pas de Facebook, pas d'emails, pas de SMS, pas de téléphone. On n'est pas habitué à vivre de la sorte, on a un peu l'impression de vivre dans une grotte. Alors que vous, vous êtes vos smartphones à la main, à checker les dernières infos, répondre aux emails urgents de vos clients, décrocher aux offres Orange venant d'une plate forme en Asie; la vie quoi !!

* Le réapprovisionnement : Besoin ou envie de quelque chose... tant pis pour toi, tu attendras ! le seul réapprovisionnement possible reste la pêche, ce qui implique que les poissons coopèrent (pas toujours le cas) et de manger encore et toujours le même poisson frais (grillé, en tataki, cru en salade...) Il vous suffit juste de descendre à l'épicerie du coin et vous y trouvez TOUT ce dont vous rêvez.

Bon, si après çà vous continuez à dire qu'on a trop de la chance, je vous confirme que vous avez raison !

Mouss'Soizic

... d'accord avec Soizic sur tout... sauf la conclusion !!!



2 - Samedi 17 décembre

                             A 1 SEMAINE DU REVEILLON DE NOEL

Imaginez vous, vous êtes seuls au monde au milieu de l'atlantique. Même si on compte 4 équipiers à bord, on ne peut objectivement n'en considérer  qu'un seul, le capitaine, de réellement vaillant.
Vous flottez sur un bateau, un catamaran (pas ceux que vous avez l'habitude de voir sur la plage, un vrai où on peut habiter ou vivre je vous rassure), sur cette immense étendue d'eau. Les terres les plus proches se situent à des centaines, voire des milliers de miles de vous. Pas le moindre signe d'âme qui vive (si ce n'est parfois un bateau fantôme apparaissant au radar). Les journées sont rythmées entre lecture, sieste, repas, bains de soleil... le rêve vous dites vous...
Et puis, 18h le coucher de soleil. La luminosité baisse petit à petit autour de vous, c'est le moment de se rentrer à l'intérieur du "cocon". La houle se fait ressentir auprès de chacun, plus de moyen de la visualiser et d'appréhender la taille, la pente et la force de chaque montagne d'eau qui vous soulève.
Tout le monde trouve sa place autour du carré, les visages blêmissent, les regards se croisent. Et c'est là que les esprits maléfiques de la nuit se mettent en place...
A chaque marin ses symptômes : fatigue intense, mal de tête, estomac retourné, ou même combo gagnant pour les plus chanceux.
L'amirale s'arrime comme elle peut aux meubles (si vous regardez bien, vous trouverez les traces de ses griffes sur la table), le mouss'Carole reste à ses côtés et lutte contre les éléments et ses fesses qui roulent au rythme des vagues. Le mouss'Soizic s'enfuit pour agoniser dans sa tanière alors que le capitaine essaie du mieux qu'il le peut de tenir le navire sur la mer déchaînée.
Les vents se renforcent, la voile bat, les vagues arrivent de toutes parts. L'imposant catamaran se transforme en une coquille de noix qui danse sur l'océan à l'encontre de notre volonté.
Vient l'heure du repas. Allant chercher au fond de lui même, Cap'tain Gil et Mouss'Carole se sacrifient pour le reste de la communauté et nous préparent de quoi tenir la nuit, ou des plats déshydratés les jours les plus difficiles.
Tout autour de la table, les regards sont hagards et les mots se font rares. Les corps luttent pour ne pas balancer comme le roulis des vagues.
La nuit ressort ses monstrueuses griffes autour de nous. Les grincements du gros Tupperware sont de plus en plus forts. Les quarts de nuit commencent et la communauté est décimée pour ne laisser qu'un courageux équipier qui surveillera la vitesse, l'angle, les possibles bateaux fantômes ou pirates, les bruits inquiétants, la voile qui danse au vent...
Les bruits se multiplient, s'intensifient, ils ne s'arrêtent plus, crac, ffff, bam, kssss, miinn, grrr, vram...
Le bateau glisse, vole, la vitesse est à la fois grisante et inquiétante, et d'un coup bam badam, un orage ?? non quelque chose tape sur la coque babord. On dirait qu'un cétacé a décidé de jouer avec nous, à moins que ce ne soient les sirènes qui cherchent à nous appeler à elles. Oui c'est çà des dizaines de sirènes essaient de grimper sur le bateau pour nous enlever et nous faire couler par 5000 mètres de fond.
Parfois un petit bruit sec, bong, suivi de rebonds... une nouvelle attaque de poisson volant, ils n'arrêtront donc jamais ceux là !
Et puis la nuit continue comme cela, elle s'étale, se transforme à chaque passage de quart, parfois plus violente, tout à coup apaisée pour mieux revenir nous secouer et nous terroriser. La lune apparait parfois pour nous faire découvrir l'horizon et nous sortir de l'obscurité totale.
Après 5 passages de relais au sein de l'équipage, 2 ou 3 empannages, le goûter nocturne, arrive enfin la lumière du jour et le lever du soleil. la mer s'est apaisée, le vent est toujours là mais parait plus coopératif, on met les lignes de pêche. Une nouvelle journée peut commencer sur Vent d'Ailleurs.

Mouss'Soizic


3 - Vendredi 16 décembre

Alors aujourd'hui, grosse journée ! on était débordés, c'est bien la 1ère fois !
Tout a commencé ce matin quand, suite à un décret amiralesque, nous avons dû attribuer un hymne à Vent d'Ailleurs et sa destination. Après une intense nuit de réflexion, puisqu'il fallait arrêter un choix difficile entre "ah le petit rhum blanc" (parodie du vin blanc avec paroles à inventer) et "donne du rhum à ton homme", cette dernière a raisonné dans le bateau (grâce à Spotify, source inépuisable de culture ).
Et là, sous nos yeux ébahis, l'Amirale a commencé à se trémousser, Diapason rouge à la main, essayant entre 2 fous rire de suivre les paroles.
Heureusement la scène a été filmée et sera bien sûr diffusée dès que nous atteindrons la civilisation, sinon c'est sûr, personne ne nous croira !
Au milieu de toutes ces émotions, le vent continuait de souffler et on faisait des surfs dans un bruit fracassant histoire de ne pas s'ennuyer. Du coup, on a atteint un nouveau record de vitesse avec une pointe à 14.5 noeuds !
Sur le moment, on faisait moins les malins, on s'est regardés avec des yeux de poissons volants !
C'est qu'on a bien le temps de les observer, vu que toutes les nuits ces boules de nerf apeurées viennent s'assommer sur le bateau. Je ne compte plus les vies sauvées, armée de mon seau et de ma pince à barbecue, par contre je ne garantie pas la santé mentale de ces pauvres bêtes après le choc et le manque d'oxygène, à mon avis ils deviennent un peu neuneus...

Mouss'Carole




4- Différentes démarches possibles pour se déplacer debout sur la mer déchaînée

* Le mode princesse/Ségolène : un peu raide visuellement mais un bon moyen pour cacher son manque d'équilibre. Par contre attention, en cas de vague travers imprévue, ne pas hésiter à abandonner sa dignité sinon c"est la chute assurée.

* Le mode enfant en bas âge : même démarche qu'un bébé qui apprend à marcher, en pensant bien à mettre les fesses en arrière pour faire balancier. Ridicule mais très efficace quand on a des choses fragiles dans les mains (appareil photo, assiettes...)

* Le mode nuit : imaginez la démarche de l'homme de cromagnon et vous y êtes. Très utile la nuit, quand on ne voit rien et qu'on n'est pas réveillé. Notez que Soizic est capable de réaliser cette cascade d'une seule main, puisque de l'autre elle accède au frigo (qu'elle dépasse rarement d'ailleurs, entre 18h et 6h du matin)

* Le mode crabe : consiste à tirer des bords sur les côtés pour accéder en général à une table, un évier et poser quelque chose dessus (en espérant qu'il y reste). La route la plus courte n'est pas forcément la plus rapide...

* Le mode crabe enfant : pour avancer droit dans le roulis. Jambes tendues, pieds écartés (bras aussi selon le déchainement de la mer) et fesses en l'air. En position, attendez une accalmie et lancez vous ! Peut aussi être utilisé pour passer une porte en évitant de la louper (parce que çà fait mal au nez). Dans ce cas, une fois lancé, ne vous arrêtez surtout pas, il y a un risque non négligeable d'être projeté contre la paroi.

* Le mode Amiralesque : attribuez vous un canapé en début de traversée, installez vos petites affaires dedans et n'en bougez plus (sinon les autres vous piqueront votre place). C'est de loin le plus confortable, et absolument sans risque de chute puisque vous êtes déjà avachi !

Mouss'Carole

5- Mardi 20 décembre



                                  A 2 JOURS DE L'ARRIVEE PREVUE PAR L'AMIRALE ! 



Après une journée plutôt longue (on attend l'arrivée avec impatience), et pleine de grosses vagues qui ont permis à notre chère Castafiore de s'échauffer la voix en prévision de sa représentation sur "Donne du rhum à ton homme" à peine l'ancre jetée, nous avons atteint les 500 miles restants !
Pour l'occasion, Soizic a sorti  ses chapeaux de Noël, et comme d'habitude on a été ridicules et on a bien rigolé !
Côté statistiques, on est pas trop mal, 161 miles pour 6.7 noeuds de moyenne ces dernières 24h.
Par contre, on a pulvérisé le record de vitesse et  évidemment c'est tombé la nuit quand l'Amirale était toute seule. Sur un surf à 17.8 noeuds, elle a poussé son cri si caractéristique et tout le monde a accouru (enfin sauf Soizic qui n'a rien entendu avec ses boules Quiès, on ne peut pas compter sur elle pour venir nous sauver !)
Et çà a continué toute la nuit, entre les 25/30 noeuds de vent et la houle qui se croisait, on en a fait des pointes à 15/17 noeuds !
Je précise quand même que je me suis retrouvée 2 fois à devoir monter en catastrophe directement de mon lit au perchoir pour empanner ou prendre un ris sous une pluie battante... en pyjama ! ça me rappelle ma Normandie !!
La prochaine fois, je dors à poil, de toute façon on ne peut rien faire sécher avec tous ces embruns qui volent... directement avec le gilet et la frontale, on ne perd pas de temps !



Mouss'Carole






Bon, bon, bon, je me trouve à écrire avec l'Amirale qui me fixe du regard juste en face, de quoi vous filer les chocottes ! Bon des fois, elle a un peu le regard dans le vague, témoin de la folie qui commence tous à nous ronger petit à petit (certains plus que d'autres j'en conviens)
Je reviens juste à notre dîner d'hier soir à base de lentilles et d'une nouvelle merveilleuse spécialité espagnole : le gros boudin noir précuit au riz... hum c'était (pas) exquis. Bref, on a franchi le cap des 500 miles restants ce qui nous a donc valu une pré-fête d'arrivée qu'on avait d'ailleurs déjà commencée à l'apéro. Il faut savoir que ce qu'on appelle apéro est à base d'eau minérale et de grignotage (notez qu'il avait déjà commencé dans l'après-midi pour Carole et Isa qui nous ont carrément dégommé un paquet de chips). Bon revenons à nos moutons, on a donc chanté l'hymne tous en cœur, mis à part Mouss'Carole qui résiste encore et toujours à l'envahisseur. On a essayé nos beaux chapeaux de Noël et l'Amirale a fait son show. En fait, c'était un peu la répétition générale pour son spectacle de fin d'année. Tout ce que je peux vous dire, c'est attention ça va saigner !
Et puis on l'a retrouvée dans la nuit étalée sur sa couche, encore habillée de sa tenue d'apparat. On ne savait trop ce qu'elle avait pu faire entre le moment où on l'avait laissée et l'instant présent mais tout était renversé autour d'elle : le sapin de Noël se trouvait sur le flanc, des plaquettes de médicaments anti mal de mer côtoyaient les Atarax, 2 verres Bacardi vides disposés au-dessus de sa tête... nous essaierons donc de découvrir le mystère de Sue Ellen.
Sinon, rapport de la matinée, on arrive à un nombre record de poissons volants suicidés sur notre embarcation. En fait, j'ai l'impression que Vent d'Ailleurs est aux poissons volants ce que le Pont de la Caille est aux Hauts Savoyards : le moyen privilégié d'en finir avec sa vie... Tristesse, ce bateau est en train de se transformer en cimetière marin.
Pas beaucoup de nouveautés, le vent et les vagues ont faibli, je crois donc que le jour de récital de la Castafiore n'est que le lundi... Par contre on a eu droit à son toilettage en live à l'arrière du pont principal, mais je m'arrêterai là, après on me reproche de faire une fixation sur cette pauvre Amirale et je ne voudrais pas être la raison du commencement d'une future dépression ! Qu'est-ce qu'on ferait sans elle ?



Mouss'Soizic



6- Mercredi 21 décembre



Journée pluvieuse et secouée sur Vent d'Ailleurs. Comme d'habitude (enfin presque), sauf que là on attend de voir la terre (peut-être demain soir s'il fait assez jour quand elle sera à portée de nos yeux) ET de capter un réseau téléphonique !
L'équipage dont la santé mentale semble se dégrader à vue d’œil (en particulier sa partie féminine c'est à dire les 3/4, d'où inquiétude), n'avait même plus le courage de faire des phrases pour se parler. Il préférait utiliser des grimaces, des cris, et s'attaquer à coups de Polaroïd (la photo la plus compromettante finit bien sûr dans ce cahier !)
Heureusement la météo a mis un peu de piquant dans cette journée (et accessoirement a privé le capitaine d'une sieste). Après je ne sais absolument plus combien de jours sous génois (quand je dis qu'on perd la boule), le vent est tombé, on a donc déroulé notre beau code 0 d'apparat. Mais c'était sans compter avec l'arrivée d'un grain, peut-être derrière nous, peut-être sur le côté. On l'a regardé un moment en philosophant pour savoir si on allait le prendre ou pas, et puis en 5 min on s'est retrouvés avec un tas de grains partout autour (magnifique sur le radar !). Du coup, branle-bas de combat, on range le code 0 et tout le reste en attendant la douche. De ce côté là, on n'a pas été déçus, c'était trop beau ! Ensuite on a sagement attendu que tout soit passé, pendant une bonne heure je pense, pour renvoyer le code 0 avant la nuit histoire d'avancer un peu.
Parce que le souci avec lui, c'est que pour empanner il faut enrouler, et comme on passe notre temps à manœuvrer pour rester sur notre route, ça n'est pas bien gérable la nuit...
Donc vers 17h, code 0 en place, environ 1 heure avant la nuit, on était pas mal. Sauf que... re mini grain qu'on n'avait pas vu venir, hop hop hop tout le monde en place pour enrouler (5 min après l'avoir déroulé donc, avouez que c'est assez malin !)
Évidemment c'est galère à enrouler au-delà de 15 nœuds de vent apparent et on avait largement plus sinon c'est trop simple ! Un coup de dévente grâce au génois et comme dirait Mouss'Soizic, " encore une affaire rondement menée !"
Et là, on se retrouve avec notre génois, il fait nuit et on a seulement 15 noeuds de vent... donc on n'avance pas, au grand désespoir de l'Amirale !
Tout çà promet encore une soirée nausées, plat lyophilisé, youpi !! On espère bien que c'est la dernière cette fois !
Et pour finir, je préfère m'auto-flageller avant que d'autres le fassent... Petite boulette de la nuit, en voulant allumer le feu de pont pour empanner (pour une fois j'avais même recruté Soizic histoire que de temps en temps elle puisse voir plus loin que le frigo), ben j'ai coupé la nav, donc le pilote auto, magique à 4h du matin, le temps de connecter mes neurones pour m'en rendre compte ! Ouf, à ma connaissance on n'a pas fait demi-tour, enfin je crois...



Mouss'Carole



7- Jeudi 22 décembre, 21 heures



                               TERRE EN VUE !



Ou plutôt faible lueur dans la nuit noire, on est à un peu plus de 20 miles de la pointe sud de la Martinique...
Mouss'Soizic est partie dans sa tanière pour se reposer la tête et revenir ensuite prête à prendre son bain de minuit. Le reste de l'équipage est sur le qui-vive, il faut surveiller le vent, les grains (en plus on est sous code 0), les bateaux autour (bizarre on a rencontré personne) et direction le phare de la pointe sud et ses éclats que l'on devrait apercevoir dans 5 miles.
23h10... plus que 6 miles avant le mouillage de Sainte Anne ! le vent nous a un peu lâché, donc on a craqué pour le moteur...
00h15... çà y est, on a jeté l'ancre à Sainte Anne !
Un petit rhum (espagnol !) et au lit !!!



Mouss'Carole



8- Vendredi 23 décembre



                         C'EST LE D-DAY !



Et oui, çà y est, à 00h15 le vendredi 23 décembre 2016, Vent d'Ailleurs et son équipage de choc boucla sa Route de la Daurade au Rhum en mouillant en baie de Sainte Anne en Martinique.
Après 18 jours, 12 heures et quelques poissons volants, nous avons mis fin à cette "merveilleuse" aventure (n'en déplaise à notre chère Amirale qui fit preuve d'un courage hors norme tout au long de cette traversée).
A priori, d'après tout ce que nous avions pu lire les uns et les autres, il est de coutume de cacher la réalité de la Transat pour dépeindre une aventure fabuleuse à vivre absolument, vous savez un peu le même concept que l'accouchement...
Bref, de concert avec l'équipage, on a décidé d'arrêter cette ânerie afin de prévenir toutes les pauvres âmes à la recherche d'une expérience sympathique pour passer des vacances uniques.
Soit, pour un voyage unique, çà l'est. Je ne regrette absolument pas d'avoir rejoint la team Petolat et d'avoir été leur animal de compagnie (merci à eux de m'avoir offert cette possibilité et SURTOUT de m'avoir supporté); bien que si j'avais su que le mal de mer me prendrait de la sorte, j'y aurais réfléchi à deux fois... mais soyons honnête, à moins d'avoir des tendances un peu masochistes (comme nous... on se découvre toujours un peu plus, c'est fou), prenez directement un billet d'avion pour faire un tour aux Antilles !
Par contre, je ne vous raconterai pas la joie qu'est celle d'arriver en Terre Promise. Les sentiments de bonheur, soulagement et tout ce qui fait de vous un être heureux sont réunis dès l'apparition de la civilisation. A commencer par les appels radio des autres bateaux et de la "terre". "Oh, on n'est plus seuls !", suivi par l'apparition furtive des lueurs dans la nuit (oui on n'a pas eu le plaisir de vivre çà de jour) "c'est bien les lumières de la côte là ??", puis la côte toute entière qui se devine, pour enfin voir apparaître la baie dessinée à coups de feux de mâts des autres bateaux amarrés pour la nuit (et je peux vous assurer qu'il y en a !)
Après, on se sent presque un peu bête, on traîne sur le pont extérieur pour profiter de la douceur de la nuit et du clapotis de l'eau. Et puis retour à la civilisation veut aussi dire retour du réseau téléphone et donc "retrouvailles" avec les amis et la famille (bon vu l'heure, la plupart était dans les bras de Morphée au pays).
On se dit qu'on va profiter d'une vraie bonne nuit de sommeil mais en fait tout le monde fait une nuit de 5 heures (héhé c'est le temps entre 2 quarts). Tout le monde est dérangé par les nouveaux bruits du bateau, ou de l'eau, ou du manque de bruit. Et puis surtout on veut la voir cette île !
Haha découvrir la terre depuis la mer n'a pas d'égal. Jamais vous ne pourrez la voir plus belle qu'en arrivant par la mer, promis juré !
Et puis on sent cette nouvelle odeur venue de la terre, et ces bruits humains qui dans le fond nous manquaient un peu.
Et puis on retrouve d'autres fous, des amis de Gilbert et Isa rencontrés de l'autre côté avant de partir.
Et puis on retourne à terre, la démarche est un peu chaloupée, on croise plein de gens.
Et puis SURTOUT, ON BOIT DU RHUM ET ON MANGE UN GROS (voire un très gros pour notre Amirale) BURGER !
Et puis surtout bis, ON ACHETE PLEIN DE RHUM avant d'aller se baigner dans l'eau pas très froide (28°) et de frotter avec grand plaisir nos salles de bains avec frénésie.
Voilà, c'était le premier jour d'Après !



Mouss'Soizic





9- Alors il paraît qu'il faut conclure...



A l'heure où Jean Le Cam vient de prendre la 5ème place du Vendée Globe (et donc de devenir le 1er Dieu humain), on est tranquillement posés et déjà pas mal bronzés.
1er constat : j'écris toujours aussi mal. Tout simplement parce qu'après avoir bravé la mer déchaînée avec mon stylo, je dois écrire depuis une position confortable, les doigts de pieds en éventail, l'Amirale me mettant du vernis à ongles sur lesdits pieds.
Vous noterez donc le retournement brutal de situation, puisque notre chère Amirale a quitté sa couche et vit maintenant à la verticale (même dans l'eau, elle court !)
S'il fallait faire un bilan, je serais bien embêtée, donc je vais livrer tout çà dans le désordre :
- grosse déception à propos des poissons volants... moi qui m'était découvert une passion de sauvetage, toujours à l'aide de mon seau et de ma pince à bbq (même dans les derniers miles avant de jeter l'ancre), j'ai appris par Teiva (bateau copain arrivé 10 jours avant nous) qu'une fois cuits ils sont délicieux ! quel gâchis, alors qu'il a fallu suer pour remonter des dorades, ceux-là tombaient quasiment directement sur la table toutes les nuits !
- heureusement, pour se remettre c'est évidemment trop bien de passer sa vie entre la baignade et les nombreuses dégustations locales...
- On a adoré aussi raconter et mimer les aventures de l'Amirale en transat au plus grand nombre ! Et surtout, cela prendra tout son sens une fois les films triés et montés ! De son côté bien sûr, elle se charge très bien de raconter la partie inconfortable de notre folle chevauchée sur les flots déchaînés...
- Et... le meilleur pour la fin... de toute façon moi j'avais dit oui juste pour çà... l'arrivée à Grande Anse ! L'endroit le plus paradisiaque au monde, en toute objectivité !! C'est beau, c'est calme, il y a l'ambiance qui va bien sur la plage, et mes amies les tortues sont toujours au rendez-vous, elles broutent juste devant le bateau... le top !
Après çà, je peux rentrer, j'ai fait mon boulot !



Mouss'Carole



Voilà, il s'agissait de quelques extraits du carnet de bord des filles, parfois délirant, parfois de mauvaise foi (surtout vis à vis de moi !!), parfois émouvant... mais qui restera pour nous un joli témoignage...
Les dessins sont de Soizic,





Et nous les remercions encore une fois toutes les 2 d'avoir été là... A bientôt les filles !!

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

2 ans et quelques miles... version du capitaine / 2 years and some miles away ... Captain's version

Arrivée à Graciosa !

Première arrivée à Horta !